Poursuite de l’activité en période de Covid 19
Poursuite de l’activité en période de Covid 19
La protection de la santé et de la sécurité des salariés ne doit pas être sacrifiée
Deux décisions aussi didactiques que pédagogiques qui confirment que les instances représentatives du personnel sont des acteurs incontournables que l’employeur doit associer à la prévention des risques.
Par un arrêt du 24 avril 2020, la Cour d’appel de Versailles a confirmé (tout en la précisant) la restriction de l’activité imposée en référé à la société AMAZON FRANCE LOGISTIQUE par le Tribunal judiciaire de Nanterre (Ordonnance du 14 avril 2020).
La restriction d’activité a été ordonnée en raison de l’absence de mise en œuvre d’une évaluation des risques suffisante par l’employeur à laquelle il n’a pas, par ailleurs associé les représentants du personnel, acteurs incontournables dans un contexte de pandémie mondiale.
Notre Cabinet assurait dans ce litige jugé en appel à Versailles la défense du CSE de l’établissement de Montélimar.
Ces deux décisions nous éclairent sur les mesures qui devront être mises en œuvre dans les entreprises en prévision du 11 mai prochain, afin de garantir efficacement la protection de la santé et de la sécurité des salariés.
- L’obligation de sécurité de l’employeur: plus que jamais au cœur des préoccupations dans un contexte de crise sanitaire
La Cour d’appel de Versailles confirme l’attachement des juridictions au contrôle des obligations imposées aux employeurs par le Code du travail en matière de santé et de sécurité des salariés.
Les articles L. 4121-1 et suivants leur imposent de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures doivent notamment comprendre des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, ainsi que la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
Afin de remplir ces objectifs, le Code du travail impose aux employeurs d’évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs compte tenu de la nature des activités de l’entreprise, et d’en transcrire les résultats dans un document unique afin de mettre en œuvre les mesures de prévention adéquates.
À l’heure du déconfinement, dans un contexte de crise sanitaire où le risque de contamination demeure important, cette obligation doit plus que jamais être au cœur des préoccupations des entreprises : les salariés devront pouvoir retrouver un environnement de travail de nature à garantir leur santé et leur sécurité.
Mais comment mettre en œuvre une évaluation des risques efficace ?
- La nécessaire association des instances représentatives du personnel à l’évaluation des risques, à tous les niveaux de l’entreprise
Si le Code du travail n’impose pas de méthode particulière pour procéder à l’évaluation des risques professionnels, la méthode retenue doit néanmoins permettre d’appréhender la réalité des conditions d’exposition des salariés aux dangers ou à des facteurs de risques.
L’INRS indique que le Médecin du travail, le service de santé au travail, le service de prévention de la CARSAT, peuvent être associés à la démarche d’évaluation des risques en raison de leurs connaissances et de leur expérience face aux situations de travail.
Ainsi que l’a relevé la Cour d’appel de Versailles, l’évaluation des risques gagnera en qualité si l’employeur associe des acteurs avec une vision pluridisciplinaire impliquant donc des compétences multiples (médicales, techniques, organisationnelles etc.).
Rappelons que la circulaire DRT du 18 avril 2002 précise que l’évaluation des risques doit être menée en liaison avec les instances représentatives du personnel, de façon à favoriser le dialogue social en constituant un facteur permanent de progrès au sein de l’entreprise.
La Cour d’appel de Versailles n’a pas manqué de le souligner dans sa décision.
Les IRP devront donc être étroitement associées au processus d’évaluation des risques, quelle que soit la structure de l’entreprise et par conséquent le périmètre d’implantation et les prérogatives des différentes instances (CSE Central/CSE d’établissements/CSSCT).
Leur implication conduira nécessairement à leur consultation sur les mesures dont la mise en œuvre est envisagée.
- Une consultation rendue nécessaire au regard des mesures de prévention à mettre en œuvre
L’arrêt AMAZON conforte le rôle fondamental des instances représentatives du personnel en période de crise sanitaire.
Le contexte de pandémie liée à la propagation du COVID-19 rend complexe la gestion des déplacements des salariés dans les entrepôts, du flux de marchandises, et de l’effectif nécessaire à la productivité.
En conséquence, les juges ont considéré que ce contexte sanitaire entraînait nécessairement une modification importante de l’organisation du travail.
La modification importante de l’organisation du travail induit une information consultation préalable et en temps utile du CSE central puis au périmètre de chacun des établissements et donc des CSE d’établissement.
Ce constat est transposable à la quasi-totalité des entreprises françaises.
Les juges en ont donc déduit qu’il devait être fait application des dispositions de l’article L. 2316-1 du Code du travail.
Ainsi, de manière générale :
- Le CSE Central devra être seul consulté sur les mesures d’aménagements communes aux établissements de l’entreprise (ces mesures devant être qualifiées d’aménagements importants modifiant les conditions de santé et de sécurité, ainsi que des conditions de travail) ;
- Pour autant les CSE d’établissements devront également être consultés sur ces mesures, en ce qu’ils ont pour mission de promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise.
Il leur appartiendra de décliner les mesures de sécurité envisagées globalement au niveau de l’entreprise, au niveau « local », en fonction des spécificités des établissements qu’ils représentent.
Par voie de conséquence, dans les entreprises d’au moins 300 salariés, la/les CSSCT auront un rôle essentiel à jouer.
Afin de garantir une analyse pertinente des risques identifiés et des mesures à mettre en place, il n’est pas exclu que le CSE puisse se faire assister par un expert SSCT (ex-CHSCT).
Le Cabinet reste bien entendu à votre disposition pour vous accompagner en cas de besoin.